Combiner Photolangage et Codéveloppement

Le photolangage

Le photolangage est un média, différent de celui du langage classique. L’objet médiateur qu’est la photographie ou l‘image, a une double polarité : un pôle réalité et un pôle représentativité. Il permet donc, plus que le langage classique, d’activer l’imaginaire, le rêve, la symbolique aussi bien chez celui qui choisit l’image que chez celui qui la reçoit. Le photolangage va permettre la mise en place d’un espace de jeu entre mobilisation de la pensée en images et mobilisation de la pensée en idées, sollicitant ainsi l’imaginaire. Cet imaginaire qui se déploie va changer, se transformer en s’échangeant, favorisant ainsi un travail de transformation mais aussi d’intégration. Durant les échanges en groupe, certains vont venir étayer l’imaginaire présenté, d’autres vont exprimer un imaginaire différent. « Cette phase est le théâtre de toutes les violences imaginaires…Les images apportées par chacun s’entrecroisent, s’entrechoquent, se renforcent, se cumulent, au point de conforter le sujet dans sa perception ou de le décaler de sa vision initiale. » (C.Vacheret). Le photolangage permet donc des « échanges d’imaginaire ». Il offre aussi un grand espace de liberté et de confiance. Peut être plus que le langage, il n’impose rien à l’autre le laissant libre de ses perceptions et de ses interprétations. En ce sens, j’y voyais une philosophie commune avec le Codéveloppement.
Intéressé par ces interactions d’un niveau différent de celles du langage classique, friand de cette liberté que le photolangage propose, j’ai eu envie de tester l’idée d’introduire du photolangage dans le Codéveloppement.

Comment faire ? A quelles étapes ?

Selon moi, le photolangage peut s’introduire à quasi toutes les étapes du Codéveloppement, même si les plus-values ne sont pas d’égal intérêt. Voici en quelques mots mes retours d’expérience, étape par étape. :
« Montée à bord », « Check-In » » Inclusion » : avant même la séance, et à l’instar de ce qui est utilisé très classiquement en formation ou en facilitation, le photolangage est utile pour à la fois guider et illustrer sa « météo intérieure » du moment, le « comment je vais » en début de séance, voire même le « qui suis-je » pour un groupe qui se découvre.

Étape 0 : Choix du couple client/situation. Dans cette étape, les participants proposent leur situation en quelques phrases qui en précise le cadre. En leur permettant, en plus de ces un ou deux phrases, de proposer une image, cela introduit une illustration qui peut être riche. Toutefois, dans mes expériences, j’ai pu constater que le bénéfice à cette étape n’était pas très important.

Étape 1 : Présentation du sujet par le client. Il expose librement son sujet pendant quelques minutes. Proposer ici au client, à la fin de son exposé, de l‘illustrer par une ou deux images, amène une richesse qui me semble intéressante. A l’instar des techniques du « cri du coeur » ou de la « manchette » cela propose une expression différente au client encore un angle de compréhension différent aux consultants que celui du simple exposé généralement très mentalisé. Ces expressions différentes (exposé, cri du coeur, images) contribuent à enrichir et densifier cette présentation et sont susceptibles d’ouvrir des pistes aux consultants afin qu’ils soient en mesure de questionner le client dans de nombreuses dimensions.

Étape 2 : Le questionnement de clarification par les consultants
Les consultants explorent la situation du client et le couple client/situation. Le client répond comme il en a envie/besoin. Il peut être intéressant de laisser des images sur la table offrant ainsi la possibilité au client de compléter parfois sa réponse par une image ou une représentation, accompagnée ou non de mots. Cela permet éventuellement également aux consultants d’inviter le client à s’exprimer par ce média, en particulier sur les questions autour des ressentis et des émotions. Par exemple, « quelle image choisirais-tu pour exprimer ton ressenti dans cette situation ? »

Étape 3 : la contractualisation de la demande du client
Je n’ai pas testé l’apport du photolangage dans cette étape, n’identifiant pas bien ni commune l’introduire, ni l’apport qu’il pourrait amener.

Étape 4 : Consultation
Dans cette phase les consultants répondent au contrat proposé par le client. Comme dans l’étape 2, il peut être intéressant de poser des photographies et des images sur la table. Les consultants ont ainsi la possibilité de « donner une image au client » ainsi la possibilité au client de compléter parfois sa réponse par une image ou une représentation, accompagnée ou non de mots. Cependant mes expériences n’ont pas été très probantes dans cette étape, le client ne retenant généralement pas le message transmis par l’image pour l’étape 5.

Étape 5 : la synthèse du client
Là encore, je n’ai pas testé l’apport du photolangage dans cette étape, n’identifiant pas bien ni commune l’introduire, ni l’apport qu’il pourrait amener.

Étape 6 : Partages et apprentissages
Dans cette phase les participants reviennent sur la séance, en prenant du recul, d’une part en exprimant les éléments qui décrivent leur vécu et leurs ressentis pendant la séance, et d’autre part, font part au groupe de ce qu’ils ont appris qu’ils ont envie de retenir ou qui pourrait servir à leurs propres situations.
Là encore le photolangage propose une richesse certaine notamment dans les expressions du vécu, offrant une gamme d’expression élargie et donnant accès davantage à l’imaginaire et aux ressentis.

Limites et conclusion

Au final le photolangage offre, à mon sens, de nombreuses possibilités de varier les expressions et favorise une réelle diversité d’expression. Attention cependant à ne pas « en faire trop » en voulant absolument que cette utilisation soit présente à toutes les étapes ou encore en imposant son utilisation.
Il doit, à mon sens, demeurer une possibilité offerte participants, de s’exprimer par ce biais à certaines étapes tout en prenant garde à bien prendre soin de la souveraineté du client et des consultants. Dans ce cadre, son utilisation enrichira indéniablement les séances en offrant de la variété et ouvrant des champs d’expression habituellement peu usités.